La console créole mêle élégance et raffinement et invite, à l’instar des plus beaux éléments du savoir-faire antillais, à plonger à travers les époques et les styles. Elle renseigne de nouveau sur l’ingéniosité des concepteurs, et l’adaptation des usages aux nouvelles modes et manières.
La console, le meuble utilitaire
Elle est d’abord connue comme structurelle, où la nécessité de la construction l’établit comme contreventement (en évitant ainsi les déformations de la charpente). Plus loin, elle habille les parois, complète un bas-relief ou une décoration murale et devient ornementale. Bientôt, on la libère du trumeau, méplat de bois éminemment esthétique et luxueux, parfaits pour réhausser les intérieurs. Elle se fait mobile, et renforce sous sa tablette pieds et entretoises, pour une autonomie du meuble.
Une autre réflexion permet de la découvrir plus fonctionnel encore : elle est alors dessinée pour soutenir l’oeuvre des hommes de comptes et de mots précis, celle de l’écrivain public. Sa forme, remarquable, et ses dimensions, atypiques, en présente un meuble utilisé debout et, là aussi, facilement déplaçable. L’on semble, dans cette évolution du modèle, privilégier l’usage à l’esthétique, sans pour autant interdire qu’elle ne s’enrichisse, à mesure de temps, pour devenir ce meuble de salon à l’élégance et finesse rare.
Un meuble ancien et résilient
On la reconnait donc ancienne, là où ses mesures trouvent la gloire du système impérial, tout en pouces et pieds. Cet usage dans la colonie française la mène vraisemblablement pour le moins au mitan du XVIIIe siècle, imposé avant les styles et les normes de la période Louis XVI. Parlant d’esthétique, elle voyage justement à travers les modes, tandis qu’on en découvre notamment sous les dessins des mouvements Empire (1804-1815) ou Restauration (jusqu’en 1830).
Dans cette dynamique d’époques et de genres, la console s’est donc assortie, comme régulièrement, dans le détail des ornements, de formes renouvelées à la Créole. Ses pieds postérieurs, basiquement, souvent droits et peu travaillés, répondent à des piétements antérieurs tournés, galbés, parfois reliés par des entretoises fines. Le plateau supérieur permet aussi les expressions des temps et des arts, en moulures et finitions. La matière : c’est celle de l’habitude, où l’élégance des bois coloniaux diffuse jusqu’en Europe : l’acajou, dans ses différentes essences, y reste maître !
Ses variantes
À mesure de temps, la console évolue donc dans ses formes et ses éléments principaux, comme les pattes travaillées, le plateau ou les entretoises. Et comme l’ingéniosité des artisans n’avait de limites que l’excentricité d’une clientèle parfois capricieuse, on en retrouve des modèles uniques, novateurs : des socles pour ramasser les pieds, des tiroirs discrets…
Finalement, à travers ces époques, c’est aussi l’influence des préférences européennes qui commande les dessins nouveaux… et permet la beauté de ces modes créoles toujours renouvelées !
Texte © Corinne Daunar – Photos : © Antiquité Ebénisterie d’Art