Par le décret Royal du 15 juillet 1763, cette île tant désirée par les marins de Christophe Colomb, va devenir une « île de force », un lieu de relégation, pour les fils de bonnes familles nobles ou bourgeoises, dont la conduite inqualifiable entache l’honneur de leurs proches.
Ces jeunes gens sont dénoncés par courriers aux autorités par leurs familles, puis envoyés sur l’île sur lettres de cachet et sans autre forme de procès, pour mauvaises conduites qui vont de la violence au libertinage, en passant par les blasphèmes, vols, ou ivresse sur la voie publique, dettes de jeu non honorées, rébellion, mais aussi parfois pour de simples questions d’héritage afin de les débouter de leurs droits éventuels. A cette fin, leurs familles déboursent 200 livres par an auprès du Trésor de la Marine.
Lieu d’emprisonnement
Aux Galets, on a construit en urgence divers bâtiments dont une prison car les fortes têtes sont parfois mises aux fers.
Départ successif
Les prisonniers sont menés au port de Rochefort et enfermés à la prison maritime, située dans une dépendance du logis du commandant Michel Joseph Froger de l’Éguille de la Rigaudière, jusqu’au jour de leur grand départ. Durant le voyage ils sont sous la responsabilité de l’officier de bord et débarquent à la Martinique où ils sont de nouveau détenus jusqu’à leur départ pour la Désirade. Le voyage s’effectue sur des vaisseaux comme le Danube, une flûte que commande le 1er octobre 1764, le baron Charles Etienne de Bombelles. En août 1764, parmi les 32 mauvais garçons qui débarquent se trouve un poitevin, Jean Charles de Jousserand (1743/1782), Lieutenant au régiment Royal d’Infanterie et condamné pour dettes de jeu non réglées, que sa mère n’a pu honorer. Celui-ci, une fois sa peine accomplie et ayant fait preuve d’une conduite irréprochable, reviendra libre en France et repartira s’établir à Hispaniola. En juillet 1765, 46 jeunes gens sont encore assignés à la Désirade. Parmi les détenus, certains ont pu s’évader avant le départ de Rochefort, d’autres ont péri durant la traversée ou sur l’île (tout comme certains soldats chargés de les garder). Tous les ans ils reçoivent de nouvelles tenues, des souliers jusqu’au couvre-chef qui les protège de l’ardeur du soleil, car certains s’occupent à cultiver la terre car les journées sont longues du fait de leur isolement et de l’ennui.
Le Gouverneur / Commandant
Gabriel Rousseau de Villejouin, Lieutenant-colonel et Gouverneur de la Désirade, responsable de ces jeunes gens, réside sur place avec deux de ses fils. Pour ce travail, il est rémunéré 10 000 livres argent et ses fils entre 1500 et 2000 livres. Ils sont secondés par des sergents inspecteurs. Les reclus sont classés en trois catégories, la première étant la voie de la rédemption, lorsque le commandant constate des améliorations dans leurs comportements une demande de remise en liberté qui accompagne une liste de noms, est envoyée tous les mois au Gouverneur de la Guadeloupe. . Au fil du temps, certains prisonniers avaient d’ailleurs choisi une fois leur peine effectuée, de rester dans les îles. Le 19 avril 1765, Pierre Gédéon de Nolivos mentionne que sur les derniers sujets encore présents à la Désirade, quatre semblent irréductibles. La même année deux familles réclament la libération de l’un des leurs et en septembre 1766, il ne reste plus que cinq reclus qui repartent en France à bord du navire le Saint-Esprit. Le 26 juin 1767, on ferme les lieux. Bibliographie : Robert Le Blant « Les Mauvais sujets à la Désirade1763-1767 ». Extrait de la revue de l’histoire des Colonies Françaises.
Texte : © Angel St Benoit