A Capesterre- Belle- Eau, cette ancienne usine sucrière en briques à ossature métallique s’abrite derrière un mur. Son porche en pierres de lave porte un écusson aux blasons surmontés d’une couronne de Marquis. Celui de gauche est illisible, celui de droite est gravé d’un chevron et de trois roses héraldiques, au dessous on lit : 1786.
LA SUCCESSION DE HOUËL
Elle incluait Brinon, devenu Marquisat par lettres patentes en Mars 1738, enregistrées en 1739, en faveur d’un proche parent, le Marquis Jean Charles de Senecterre. Ces terres comprenaient une sucrote et un moulin à eau.
La propriété est revendue le 18 Mars 1754, à Philippe-Parfait Pinel (1720/1786) écuyer, Sieur Dumanoir, Colonel d’Infanterie, député de la Colonie de la Guadeloupe près du conseil du Roy, époux de Reine Giraud d’Orzol.
Il en fait la propriété Moulin-à-Eau, dont l’entrée s‘effectue sous un bel aqueduc qui alimente l’usine en eau de source et qui est encadré d’une allée de galbas, (une Ordonnance en 1767 recommande la plantation de cet arbre à écorce aromatique, aux fruits servant de billes aux enfants).
FAMILLE PINEL
Le 6 Septembre 1775, les frères Philippe-Parfait Pinel Dumanoir, Michel Pinel de la Salle, Jean- Baptiste Pinel de la Palun, Guillaume Pinel de Saint Martin, enregistrent leurs titres de famille. *« Le 3/09/1777, dame Pinel rendit Foi et Hommage pour le Marquisat de Brinon dans les registres du Conseil Souverain de la Guadeloupe »*.
En 1784, plus de deux cent esclaves y travaillent, sur trois cent hectares. En 1786, Guillaume, le fils (1761/1832) succède à son père. Déclaré planteur émigré en 1794, ses biens sont placés sous séquestre sous le mandat de Victor Hugues.
L’ÉCRIVAIN DE LA FAMILLE
Guillaume regagne ses terres en 1802, où nait le 26 Juillet 1806, le petit fils de Philippe, nommé Philippe-François Pinel Dumanoir. Celui-ci, à seize ans, part vivre à Paris où il devient auteur dramatique, puis de 1836 à 1839, directeur du Théâtre des Variétés.
Vers 1830, son père fait planter la majestueuse allée de plus de 400 palmiers royaux, voie royale nommée successivement : Allée Moulin-à-Eau, Allée Pinel, Allée Dumanoir. L’une des sœurs de Guillaume, de par son mariage, était si riche que l’expression « Riche comme Madame Pinel » détrôna « Riche comme Crésus ».
En 1863, on modernise la sucrerie avec des machines à vapeur. Les emprunts contractés auprès du Crédit Foncier Colonial ne pouvant être remboursés, les Pinel sont expropriés et leurs biens sont saisis.
LES LACAZE-POUNÇOU
En 1873, Mr Lacaze Pounçou rachète le Marquisat, Changy et Bois Riant. En 1878, son rhum est honoré par une médaille d’or. Il fait moderniser l’usine mais décède avant d’avoir vu son projet finalisé. Son fils lui succède mais en 1884, l’usine étant grevée d’emprunts, l’histoire se répète, le Crédit Foncier Colonial saisit le Marquisat pour l’exploiter.
MODERNISATION DES LIEUX
En 1898, une ligne de chemin de fer convoit le sucre de l’usine jusqu’au port de Sainte Marie.
En 1946, les vieux moulins remplacés, l’usine traite par jour plus de mille tonnes de cannes, la bagasse chauffe les chaudières et l’électricité supplémentaire produite lors des campagnes sucrières, alimente la commune.
Juillet 1970, marque l’arrêt des machines de l’imposante Usine Marquisat de Brinon.
Texte : Angel St Benoit
Source : *Euraldic.com