ZÉVALLOS SON USINE ET SA MAISON COLONIALE

par Maisons Créoles

En 1732, sur la commune du Moule, les terres du Comte Hector Parisis de Zévallos traversées par une majestueuse allée de palmiers royaux, s’étendent sur 136 hectares. On y trouve une sucrote et sur le domaine, plus de cent esclaves cultivent des vivres, du tabac, de l’indigo et du coton. En 1802, à la mort du Comte, la propriété fait près de 1000 hectares.

LA COMPAGNIE DES ANTILLES
Elle est créée à l’instigation du Comte de Chazelles (1800/1866) propriétaire de l’Habitation Marly à Sainte-Anne et d’Adolphe Lebaudy, lesquels décident d’installer en Guadeloupe des Usines Sucrières Centrales. La Compagnie qui implante quatre usines, dont Zévallos en 1845, sera liquidée trois ans plus tard.

L’USINE DE ZÉVALLOS 
Le 14 janvier 1870, Auguste Duchassaing de Fontbressin, également propriétaire de l’usine Duchassaing au Moule, (construite entre 1860 et 1862), fait la demande d’une main d’œuvre de 60 migrants Indiens pour travailler sur les terres de Zévallos, où sont traitées les cannes-à-sucre de Bellemare, Bellevue, Jaloriste, La Guillotière, Letaye, Sainte-Catherine, Saint-Jean et Saint-Quentin.

SON CHEMIN DE FER
Il est inauguré en grandes pompes le 1er mars 1870, devant un public choisi, qui assiste au demi-tour de la locomotive sur une plateforme proche de l’usine.

L’usine est rachetée en septembre 1902 par Raphaël Wachter, puis le 23 septembre 1911, par Mr Koch Foccart, le 9 mai 1927 par l’usine Sainte-Marthe… Quelques vestiges sont encore visibles, comme la cheminée en briques roses, haute de dix-huit mètres au socle carré percé d’ouvertures, le puits profond de 32 mètres, le local à bascule où l’on pesait les cannes, un hangar (autrefois en pierres dans lequel on rentrait la locomotive), la plateforme du train, une turbine, l’entrée d’un cachot et celle de deux tunnels reliés à la cave de la maison à sa construction.

L’HABITATION
Deux maisons de type Eiffel, en pièces détachées, aux structures en fer, étaient dit-on destinées à un riche planteur de coton Louisianais souhaitant doter ses filles jumelles. En 1871, le bateau qui les transporte s’arrête à Pointe-à-Pitre, le capitaine les vend aux enchères pour réparer les avaries du navire. L’une est achetée par Ernest Souques, directeur de l’usine Darboussier, qui en fait sa maison de Pointe-à-Pitre, de nos jours Musée Saint-John-Perse.

Auguste Duchassaing de Fontbressin achète la seconde qu’il fait installer sur les terres de Zévallos, devant l’usine. De fines colonnes soulignent les murs montés en briques, les façades s’habillent de balcons ouvragés, de dentelles en zinc. Pour parfaire l’ensemble, les initiales du maitre des lieux sont placées à l’étage, vers la rue, au centre du balcon surplombant la marquise d’entrée qu’encadrent des poteries d’Anduze. Au sous-sol se trouvent une case-à-eau et une case-à-vent servant d’abri en cas de cyclone.

La grande pièce du bas agrémentée de poteaux sculptés, est séparée en deux par une cloison. D’un côté se trouve la salle-à-manger aux murs soulignés de panneaux ouvragés de haches Caraïbes stylisées. Le salon plus contemporain s’est inspiré des salons Parisiens de l’époque. Un escalier en bois situé à l’arrière mène à deux chambres séparées par un cabinet de toilette où trônait autrefois une baignoire aux élégants pieds en fonte. Le toit des combles, recouvert de tuiles est percé de  chiens assis. La propriété s’enrichira d’une volière, d’écuries, d’un kiosque, de six petits pavillons logeant les domestiques.

UNE MYSTÉRIEUSE AURA
Habitée par des propriétaires successifs, elle est sujette à des histoires de revenants : La plus romanesque fait état d’un amour interdit entre un ouvrier du domaine et la sœur d’un propriétaire, lequel rentré un soir à l’improviste, aurait découvert les amants, tué l’homme, puis serait parti à cheval, d’une traite jusqu’à Saint-Claude, pour y prendre son petit déjeuner chez le Gouverneur, pensant par la rapidité du trajet se dédouaner de son acte.

STÈLE COMMÉMORATIVE
Le 28 mai 2011, près du portail d’entrée sous un carbet, on appose une plaque commémorant l’arrivée sur l’île le jour de Noël 1854, de 314 engagés Indiens d’origine Tamoul, débarqués du navire l’Aurélie, dont le Capitaine Marseillais  se nommait Auguste Blanc.

Cette belle maison coloniale au charme mystérieux, au style évoquant l’habitat de la Nouvelle-Orléans, est classée aux Monuments Historiques le 24 septembre 1990.

Texte et photos : Angel St Benoist

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